Le moral dans les chaussettes, j'avais quitté Bélen, petite ville au nord de l'Argentine depuis à peine une heure. J'étais concentrée sur le bruit suspicieux du moyeu des pédales, un crr-crr qui revenait à intervalle régulier, un bruit qui me disait clairement que mon vélo était fatigué. Moi-même fatiguée du vent, du soleil, de la monotonie des paysages, du peu d'accès à internet, mais surtout fatiguée de ne pas pouvoir retirer des sous dans les rares banques croisées et de savoir que je vivais avec à peine 200 pesos en poche et qu'il me restait encore des centaines de kilomètres avant de rencontrer une banque fiable, je suis donc arrivée à Londres (10 km après Bélen ) le moral dans les chaussettes, sans grande motivation.
Au détour d'une ruelle, je demande la direction à un vieux monsieur dans une vielle Wolswagen, qui finalement me propose de venir manger dans sa ferme de noix. J'accepte avec méfiance je dois dire, mais plus que jamais j'avais à ce moment besoin d'un contact humain chaleureux. Jorge m'a offert de me reposer chez lui,offert un sac entier de noix, un pot de confiture maison, dulce de batata pour la route, du vin, de goûter à de la langue de bœuf, d'aller voir ses chevaux péruviens, et ses noisetiers, le plaisir de sentir les fleurs de jasmin, bref du concentré de motivation et d'amour en conserve pour la suite du voyage.
A Jorge el gaucho, mais aussi médecin, politicien, cycliste, producteur et plus que tout le "padre", tout mon respect et ma reconnaissance...